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notre correspondant à
Strasbourg (67), Antoine
SPOHR
"TOUS
LES SOLEILS" un film
éblouissant de Philippe
Claudel - 5 avril
2011
Comédie à litalienne
avec sa part démotions
et de rires. Et plus.
Comment ne pas être
tenté dy croire
quand on entend lécrivain-cinéaste
parler de ses personnages
avec ce petit sourire
malicieux de lhomme
grave qui samuse un
tantinet : les morts
demeurent. Oui, souvent.
Lépouse disparue
reste non seulement en
portrait mais en
empreinte indélébile
dans le cur et la
vie dun jeune veuf,
enfin pas si jeune que
cela, puisque cela fait
près de dix ans quil
élève seul sa fille
qui, à sa grande
surprise, séveille
au vert paradis des
amours adolescentes. Elle
a désormais quinze ans,
et tout reste figé pour
ce professeur italien de
musique baroque,
enseignant ordinaire à luniversité
de Strasbourg.
Cette ville, capitale
européenne, est bien
plus quun cadre
pour le cinéaste : il la
connaît et laime,
comme il aime tous ces
personnages si divers
pourtant. Sa caméra
caresse les méandres des
rivières et des canaux,
les quais bordés dimmeubles
souvent en grès rose. Ce
quil en dit, est
comme un symbole de cette
diversité :"on y
entend la musique de
toutes les langues,
grâce au Parlement
Européen et au Conseil
de lEurope".
A côté de cela, lhomogénéité
européenne est vivante
dans le choix de la
sublime musique baroque,
autre personnage du film.
Pour autant, il ne faut
pas simaginer quil
ne se passe rien et mieux
vaut garder son mouchoir
à la main pour essuyer,
tour à tour, les larmes
de la compassion sans
pathos et celles du rire
franc sans grossièreté.
La souffrance du héros
ou plutôt du personnage
central nest quordinaire.
Sa vie sécoule
presque vaine,
paisiblement entre
quelques amis, doux
soixante-huitards
attentionnés, la
pratique de la musique et
une petite action
humanitaire ou caritative
par des séances de
lecture aux malades dans
un hôpital.
Cest là quon
rencontre une vieille
dame attendrissante
interprétée par une
Anouk Aimé toujours
aussi belle et un
vieillard truculent
encore habité par le
démon de minuit et
quart. Mais les
révélations du film
seront, sans conteste
possible, ces deux
comédiens italiens,
encore peu connus en
France.
Le père (Stefano Acorsi)
est "juste" et
supporte résigné, sa
vie telle que le destin
la lui impose, y compris
avec son frère (Neri
Marcoré) quil
héberge.
Inénarrable
"peintre
répétitif",
anarchiste soft, ce
dernier sest
réfugié à Strasbourg
où il réclame lasile
politique pour échapper
à la dictature éhontée
de Berlusconi. Il ne
quittera pas son
accoutrement , un pyjama
et une robe de chambre,
avant la libération de lItalie.
Clown éblouissant, en
dépit de quelques
provocations qui
pourraient avoir des
conséquences
dramatiques, il nous
livre une prestation
exceptionnelle,
inoubliable.
Alors les larmes ? Oui,
reste un épilogue
heureux avec Clotilde
Courau et des larmes de
joie, en musique, dans un
lieu magique.
Film truffé de bons
sentiments ? Et alors ?
"Dans ce film, jai
voulu traiter de sujets
graves et échapper à
une mode de comédies qui
jouent sur un humour un
peu superficiel" dit
Philippe Claudel dont la
palette est assez diverse
pour quil puisse
sans fausse vergogne,
célébrer aussi ce quil
aime : "Le vin, la
bouffe, lamitié,
la littérature et le
cinéma". Tiens, il
a oublié la musique.
Un film à ne pas manquer
pour le divertissement
dans lequel on trouvera
une invitation au
bonheur.
"Attendez vous à
(sa)voir" comme
aurait dit la lointaine
chroniqueuse Geneviève
Tabouis , un film
réjouissant.
Une petite ombre
cependant : la crainte de
voir sestomper peu
à peu le remarquable
écrivain derrière le
cinéaste de plus en plus
fécond.
Sortie du film : le 30
mars 2011
Antoine SPOHR
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