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De notre correspondant à Brest, Michel PALUD


L’histoire de la bière
- 20 septembre 2007


Au commencement n’était point le sous-bock.

Au commencement, voici 6000 ans en Mésopotamie, était un breuvage répondant au curieux nom de « Sikaru ». Tellement curieux d’ailleurs, qu’aujourd’hui absent de la plupart de nos dictionnaires. Préparé par les femmes à base d’orge et d’épeautre, servie par des prêtresses, cette boisson revêt un caractère prépondérant dans la vie religieuse, puisqu’elle est sert notamment d’offrandes aux divinités.

Plus tard, beaucoup plus tard, l’Egypte antique montre toute son appétence pour le «vin d’orge» qui devient boisson nationale. De nombreux hiéroglyphes témoignent de sa présence lors des fêtes populaires et religieuses. Une farine élaborée à base de céréales broyées (orge, millet, épeautre), additionnée d’eau, permettait la formation de pains cuits au four, technique qui favorisait le transport et la conservation. Emiettés et mouillés d’eau, ces pains étaient ensuite placés en fermentation, puis livraient à la fois des bières de consommation courante et des breuvages à usage thérapeutique ou cosmétique. La bière sert même parfois de monnaie d’échange et certains salaires sont honorés en « pain-bière ».

La Grèce antique connaît également la bière, que défend pour ses vertus médicinales Hippocrate, un des plus éminents médecins de l’Antiquité.

C’est sous l’influence de Rome, qui lui préfère pourtant le fruit de la vigne, que la bière se développe en Gaule sous l’appellation « cervesia » (cervoise), en l’honneur de Cérès, déesse des moissons. Particulièrement appréciée des Gaulois, la cervoise est de tous les banquets, et les druides en font large usage dans leurs décoctions. La forte popularité de la bière chez les Gaulois tient notamment aux craintes des maladies que pouvait provoquer la consommation d’eau, en cas de pénurie d’eau potable. Boisson élaborée, la cervoise était réputée sans risque pour la santé et s’est donc naturellement intégrée au régime alimentaire courant. C’est au peuple gaulois que l’on attribue en outre l’invention du tonneau en bois, servant à la fermentation, à la maturation, à la conservation et au transport de la cervoise.

La fabrication de cervoise n’évolue plus des siècles durant et c’est vers l’an mil que va se développer une innovation technique majeure qui va révolutionner le breuvage et le faire basculer vers la bière moderne. C’est en effet à cette époque que se généralise l’introduction de houblon qui se substitue aux diverses plantes aromatiques jusqu’alors utilisées, donnant à la bière cette amertume qui lui apporte sa véritable signature.

L’élaboration de la cervoise devient un art et les recettes se peaufinent peu à peu çà et là. Les moines se montrent particulièrement habiles à l’exercice et certains noms d’abbayes traverseront d’ailleurs les siècles : Leffe, Affligem, Orval, etc.

Au cours du Moyen-Age, la bière se développe essentiellement au Nord de l’Europe, chez les peuples anglo-saxons, et ce sont les Germains qui lui donnent au 15ème siècle son nom actuel, « Bier » qui signifie tout simplement boisson en néerlandais.

Jusqu’au début du 19ème siècle, les techniques de brassage demeurent identiques à celles des moines du Moyen-Age : les brasseurs produisent un breuvage, en petite quantité et pour une consommation locale, issu d’une fermentation haute (entre 15 et 20°), qui ne permet pas une longue conservation. Alors que la technique était connue des moines dès le 15ème siècle, ce sont des Tchèques, en la ville de Pilsen, qui vont véritablement élaborer la bière à fermentation basse, entre 7 et 12°, permettant transport et conservation longue. Particulièrement limpide et rafraîchissante, la boisson se fera connaître sous le nom de « Pils », bien connue des amateurs de bière blonde et dorée.

Le dernier tournant, décisif, s’opère au milieu du 19ème siècle. La bière demeure en effet jusqu’alors un produit instable et fragile, et sa fermentation reste un phénomène mystérieux, malaisé de maîtrise. Ainsi, les productions subissaient-elles parfois des incidents de fermentation dont les causes n’étaient pas déterminées. En 1854, Louis Pasteur s’intéresse à la chimie de la fermentation et découvre l’existence de micro-organismes dans la levure, permettant cette fermentation. Ses travaux le conduiront à la découverte de la "pasteurisation" et seront d’une grande utilité aux brasseurs de bières, qui désormais pourront garantir la fabrication et la conservation de leur production dans des conditions nécessaires d’hygiène. En 1876, Pasteur publiera une méthode de travail à destination des brasseurs par laquelle il préconise une sélection rigoureuse des levures et une protection de la bière pendant les opérations de brassage.

D’innombrables bières existent aujourd’hui de par le monde. Blondes, brunes, rousses, blanches, ambrées, porter, d’abbaye, cervoises, issues de différentes méthodes de fabrication, chacun trouve désormais bière à son bock et le choix n’en devient que plus difficile !

La consommation mondiale annuelle approche le milliard d’hectolitres et se situe en seconde position des boissons élaborées, derrière le thé.

Depuis plusieurs années, les Français se détournent toutefois quelque peu de la consommation de bière, notamment de moins en moins bue au cours des repas, à l’inverse des Belges, Néerlandais et Allemands, grands producteurs et grands consommateurs.



Michel PALUD
 



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