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Allocution
de M. Jacques CHIRAC Président de la République lors de
l'élévation à la dignité de Grand officier de l'Ordre
de la Légion d'honneur de l'Abbé PIERRE (Palais de
l'Elysée)
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Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la
République, prononcée lors de l'élévation à la
dignité de Grand officier de l'Ordre de la Légion
d'honneur de l'Abbé PIERRE .
Palais de l'Élysée, Paris le jeudi 19 avril 2001.
Mesdames, Messieurs,
Bienvenue dans ce Palais de l'Élysée où je suis,
naturellement avec mon épouse, très heureux de vous
accueillir.
Cher Abbé PIERRE,
C'est avec joie et aussi avec émotion que je vous
retrouve aujourd'hui, entouré des responsables
d'Emmaüs. Je me réjouis de les saluer. Dans quelques
instants, je vais vous avoir le privilège de vous
élever à la dignité de Grand Officier de l'Ordre de la
Légion d'honneur.
Celui qui a vécu au milieu des plus pauvres des pauvres,
l'insurgé qui, toute sa vie, a refusé la misère et
l'injustice et qui nous dit, aujourd'hui comme hier,
qu'il faut se battre afin que tout homme obtienne ce à
quoi il a droit : un toit, de quoi manger et vivre
décemment, cet homme-là, je le sais, ne recherche ni
l'admiration ni les honneurs.
Aujourd'hui, cher Abbé PIERRE, ce que je veux vous
exprimer, au nom de tous les Français, unanimes, vous le
savez sur ce sujet ce qui n'est pas courant, c'est le
respect, l'attachement, l'amitié que les Français vous
portent. Et cet hommage que la France rend à un homme
hors du commun récompense les efforts que vous avez
accomplis pour défendre les droits de la personne
humaine et pour faire reconnaître partout sa dignité.
Être marin, missionnaire ou bandit, Henry GROUÈS, le
petit garçon que vous étiez, a hésité. À quinze ans,
au retour d'un pèlerinage à Rome, cela a été la
Rencontre à Assise, dans l'éblouissement d'un matin de
Pâques, aux Carceri : comme saint-François, vous serez
moine. Plus tard, à votre père, qui vous a appris tout
jeune à aller à la rencontre des plus pauvres, vous
confierez cette décision d'entrer comme novice chez les
Capucins. Déjà, vous avez "voué le meilleur et le
tout de votre coeur à tous les vagabonds du monde".
Sept ans de vie contemplative à observer une règle
très dure où s'épuise quelque peu votre santé, trois
autres années passées en recherche et en adoration,
avec, pour directeur de conscience, un homme éminent
s'il en fut, le père de Lubac qui vous souhaite, la
veille de votre ordination, "l'anticléricalisme des
saints", vous voilà désormais tertiaire de
saint-François et aumônier auprès de l'évêque de
Grenoble. C'est la guerre et l'Occupation. Mobilisé,
puis hospitalisé pour une pleurésie, vous êtes vicaire
à la cathédrale de Grenoble lorsque deux familles
juives qui viennent d'échapper à une rafle vous
demandent de les cacher : l'abbé GROUÈS, avec l'aide
des Dames de Sion, un curé, un guide et un douanier, va
se faire passeur d'hommes et faussaire.
Ces douze premiers rescapés à qui vous faites gagner la
frontière suisse par le col du Tour et le glacier du
Trient furent suivis de nombreux autres -c'est vous qui
réussirez à sauver Jacques de GAULLE, le frère du
général-. À la Chartreuse d'Isère, puis dans le
Vercors se créent des maquis dont vous êtes le parrain.
Avec Lucie COUTAZ, la secrétaire que vous recommande le
père de Lubac, vous écrivez, elle édite et diffuse un
journal, "L'Union Patriotique Indépendante".
Une telle activité oblige bientôt celui qui est connu,
dans la Résistance, sous le nom de l'abbé PIERRE, et
que recherchent la Gestapo et la Milice, à quitter
Grenoble pour Lyon, puis Lyon pour Paris où vous
organisez des passages vers l'Espagne. Arrêté à
Combo-les-Bains, échangé à Madrid contre deux tonnes
de blé, vous gagnez Alger où vous rejoignez le
général de GAULLE. Vous ne pourrez, en raison de votre
santé, participer au débarquement en Méditerranée,
mais vous devenez aumônier de l'École navale au Maroc
et vous embarquez sur le "Jean-Bart" avant
d'être rappelé à Paris.
1945 : après l'exaltation de la Libération, vous allez
découvrir à Paris les drames de la misère. Parce que
vous êtes "homme, vibrant de tout ce qui fait
frémir l'homme", vous, le curé du maquis, qui
portez la Croix de guerre et la médaille de la
Résistance, vous vous inquiétez : "Mon Général,
la paix est un tout petit enfant ; elle peut
mourir", dites-vous au général de GAULLE qui le
répète et dont l'entourage d'ailleurs vous pousse à
vous présenter aux élections législatives.
Représentant de la Résistance à l'Assemblée
consultative, puis député de la Meurthe-et-Moselle à
l'Assemblée constituante, vous vous insurgez sur les
bancs du Palais Bourbon : "Il existe, dites-vous,
une misère extrême. C'est là que doit porter notre
effort d'abord. C'est la passion de la justice qui nous a
jetés dans ce combat".
C'est alors que va prendre corps l'une des plus
extraordinaires aventures humaines de cette deuxième
moitié du XXe siècle.
Tout a commencé, dites-vous, "parce que la maison
était trop grande". Cette maison est une villa
délabrée que vous venez de louer à Neuilly-Plaisance
et avez entrepris de réparer vous-même. Elle héberge
votre assistante, la fidèle Lucie COUTAZ, et l'un de vos
collègues de l'Assemblée avec sa famille. Très vite,
la maison de Neuilly va accueillir le premier compagnon,
Georges LEGAY, un ancien bagnard que vous avez sauvé du
suicide, puis un jeune délinquant qui a fui la maison de
correction, un agent de police, un boxeur sortant de
prison, des blessés de la vie à qui vous avez dit
simplement : "Je ne peux rien vous donner, mais vous
pouvez m'aider".
Avec ce petit groupe de compagnons-bâtisseurs, pendant
deux ans, vous allez aménager une auberge de jeunesse,
Emmaüs, du nom de ce petit village de Palestine, dans la
banlieue de Jérusalem, où des pèlerins, en
reconnaissant le Christ ressuscité dans le compagnon qui
partage leur repas, ont retrouvé "des raisons de
vivre". Ces raisons de vivre que viennent de
retrouver Georges et les autres, cette poignée de gueux
qui sont un abrégé de la misère du monde et dont vous
ferez "des hommes debout". Cette raison de
vivre, c'est votre force
Lorsqu'en décembre 1949, Emmaüs recueille une famille
expulsée, une porte de la solidarité et de la
fraternité s'est ouverte qui ne se refermera plus. Avec
pragmatisme, avec simplicité, avec aussi une ténacité
incroyable, vous allez dès lors accueillir ces pauvres
sans logis et sans travail qui arrivent à Noisy, jour
après jour, et dont le flux semble ne devoir jamais se
tarir.
Pour eux, grâce à votre indemnité parlementaire, et
avec l'aide de vos compagnons, vous bâtirez la maison du
Pont, près du viaduc d'Auteuil, puis Champs-Fleuris, la
première cité d'urgence.
Lorsque vous quittez l'Assemblée nationale en 1952, les
sans-logis affluent toujours à Emmaüs. Malgré la perte
de vos indemnités parlementaires, vous ne renoncez pas.
Ce sont vos compagnons qui trouveront la solution : la
récupération des vieux matériaux et des vieux objets
se révélera une pêche miraculeuse. La
"biffe", puis la "chine" et les
"gadoues" apporteront l'argent nécessaire à
la vie de la communauté et à la construction de
nouveaux centres. Un défi social est en train de naître
: Emmaüs, association non confessionnelle que vous avez
fondée avec Mademoiselle Lucie COUTAZ, n'est pas une
institution de bienfaisance ou d'assistance, c'est une
communauté où tous apportent et retrouvent leur
dignité dans le partage, une communauté ouverte
également aux volontaires d'origines les plus
différentes qui les rejoignent pour les aider.
La maison s'est agrandie : la Réserve à
Neuilly-sur-Marne, la Pépinière à Pontault-Combault,
la Socomac à L'Haÿ-les-Roses, le centre de
Plessis-Trévise ont été construits. Sans doute les
normes administratives ne sont-elles pas toujours
parfaitement respectées. Mais au printemps 1953, 300
logements sont achevés ou en chantier. Grâce à vous et
à l'appui de vos amis politiques, les caisses
d'allocations familiales ont été autorisées à faire
des prêts pour préfinancer les constructions de
logements et la communauté vient d'acquérir un secteur
dans la forêt de Pomponne. Pourtant les besoins se font
toujours aussi cruellement sentir lorsqu'arrive l'hiver
1954.
La mort d'un bébé, la venue d'un ministre à son
enterrement, une vieille femme tuée par le froid
boulevard de Sébastopol et votre appel, le 1er février
1954, -quelques phrases griffonnées sur un bout de
papier et lues aux actualités de la Radio nationale et
de Radio-Luxembourg- cela va bouleverser la France.
Dans la précipitation et l'improvisation se développe
un extraordinaire mouvement de solidarité : c'est
"l'insurrection de la bonté". Les dons et les
appels convergent vers l'hôtel Rochester. Quatre
stations de métro désaffectées, mais aussi le palais
de la Mutualité, le lycée Michelet, l'Institut
catholique, puis les gymnases, les palais de justice, les
dispensaires, les mairies, les églises s'ouvrent aux
sans-abris. Sur la montagne Sainte-Geneviève, une
immense toile de tente est montée. Des centaines de
volontaires dont vos amis, Robert BURON et Georges
LILLAZ, le directeur du Bazar de l'Hôtel-de-Ville, vont
à la rencontre des "couche-dehors": l'ancêtre
du Samu social, que le docteur Xavier EMMANUELLI créera
avec moi à Paris en 1992, et qui fera école dans plus
de quarante villes de France, vient de naître.
"La vertu persuasive de la parole" a déclaré
la guerre à la misère. Un mois après le refus de
l'amendement présenté par Léo HAMON, le Parlement
adopte un plan de 12 000 logements de première
nécessité et les chiffonniers d'Emmaüs avancent
l'argent pour les 48 premières maisons du Plessis dont
la construction commence dès le 8 février. Ce jour-là
est lancée l'opération "Paris vous aide" qui
réunira 320 tonnes de matériaux et de vieux objets dont
la vente produira 150 millions de francs., anciens bien
sûr, versés à Emmaüs : le bilan de votre appel au
secours a dépassé toutes les espérances.
"Ce qui s'est produit le 1er février, direz-vous,
c'est la renaissance d'une âme commune, la résurrection
d'une volonté commune d'empêcher que des innocents
souffrent d'une manière aussi stupide".
Vous êtes devenu "la voix des sans-voix" et la
notoriété que quelques mots, quelques phrases
prononcées à la radio vous ont acquise, va faire de
vous un mythe vivant. Mais déjà, à Genève, vous
continuez votre combat contre la misère et pour la paix.
Vous êtes désormais "un homme qui vient parler
avec d'autres hommes de bonne volonté des problèmes qui
écrasent l'homme d'aujourd'hui dans l'univers
entier".
Pour cela, vous allez parcourir le monde, de conférence
en conférence, de réunion en réunion, vous arrêtant
seulement lorsque votre épuisement vous y contraint,
reprenant sans cesse votre bâton de pèlerin, refusant
tout nouvel engagement politique, tendu vers un seul but
: éveiller la conscience publique, obliger les élus
locaux, nationaux, internationaux à voir en face les
vraies urgences humaines.
Les États-Unis, le Canada, l'Inde, le Liban, l'Amérique
latine, l'Afrique vous demandent. À Calcutta, vous
rencontrez Mère Térésa ; à Rio, Dom Helder Camara ;
à Buenos Aires, José Balista et le docteur Schweitzer
à Lambaréné.
Emmaüs, grâce à votre charisme, connaît une expansion
internationale extraordinaire. Des communautés se
développent au Japon, au Canada, en Argentine, partout
dans le monde.
Lorsque vous manquez de périr dans un naufrage, en
juillet 1963, vous prenez conscience que, vous disparu,
Emmaüs, après quinze années d'existence, ne possède
aucune organisation ni structure qui lui permette
d'assurer sa pérennisation. Cette lacune sera comblée
grâce à un travail de six années qui aboutira à la
réunion, à la Pentecôte 1969, des premières Assises
mondiales du mouvement Emmaüs, à Berne. Le Manifeste
universel du mouvement -"Faire que soient partout
servis premiers les plus souffrants"- y est adopté
à l'unanimité, le secrétariat général est fixé à
Montréal. Les statuts de l'Association internationale
seront adoptés en 1971 et le Centre d'information créé
en 1974 pour parer les risques d'isolement des groupes,
tandis que vous faites paraître une revue, "Faims
et soifs des hommes".
Emmaüs a atteint l'âge de la maturité. D'autres
combats vous attendent. Au début des années 80, en
France et dans les autres pays développés, apparaît ce
que l'on appelle "la nouvelle pauvreté". Vous
qui avez obtenu trente ans auparavant l'arrêt des
expulsions en hiver, vous lancez, en hiver 1984, un autre
appel. Pour venir en aide aux exclus, vous serez à
l'origine de la création, avec l'Armée du Salut et le
Secours catholique, de la Banque alimentaire. Et tandis
que Coluche vous remet, à la fin de l'opération
"Les Restos du coeur", un chèque d'un million
et demi de francs, la Fondation Abbé PIERRE pour le
logement des défavorisés voit le jour. En 1992, vous
obtiendrez la création du Haut Comité pour le logement
des plus défavorisés présidé aujourd'hui par le
docteur Xavier EMMANUELLI. En 1998, a été adoptée la
loi contre les exclusions. Malgré tous ces efforts, la
Fondation Abbé PIERRE, dans son sixième rapport publié
en février dernier, relève qu'elle n'a pas encore
produit tous ses effets, souligne que le nombre de
logements sociaux est dramatiquement insuffisant et que
les centres d'accueil ne suffisent plus devant l'afflux,
notamment, des demandeurs d'asile.
Ouvrons les yeux : la misère est là. Elle ne recule
pas. Plusieurs dizaines de personnes meurent encore
chaque année dans la rue. Près de quatre millions de
Français, très souvent des jeunes, vivent entre petits
boulots et chômage, sous le seuil de pauvreté.
La France s'honore d'être une grande démocratie. Elle
s'honore d'avoir mis en place un système de bonne
gouvernance. Mais la démocratie, la bonne gouvernance,
c'est aussi la juste répartition des richesses.
C'est en créant les conditions d'une croissance durable,
que nous serons efficaces dans ce combat contre
l'inacceptable. C'est aussi en nous tournant davantage
vers les plus démunis, les plus vulnérables, ceux qui
ne sont pas organisés pour se faire entendre.
La revendication sociale est légitime dans une
démocratie, car il est dans la nature de tout homme de
vouloir améliorer ses conditions de vie. Mais dans la
répartition des fruits de la croissance, l'État ne doit
pas laisser les plus bruyants et les mieux armés prendre
la part de ceux que l'on entend le moins. Il doit
arbitrer entre les intérêts, établir des priorités.
Celles-ci ne peuvent être le résultat de pressions
collectives successives.
Au-delà des minima sociaux, au-delà des secours
d'urgence, la solidarité, vous nous l'avez appris, c'est
avant tout une main tendue.
Par expérience, cher Abbé PIERRE, vous savez que la
misère recouvre toujours des drames humains. Face à
tant de désarroi et de désespoir, les aides, les
allocations sont essentielles, bien sûr, mais elles se
révèlent largement impuissantes si elles ne
s'accompagnent pas d'une préoccupation, d'une exigence
d'humanité.
La solidarité, ce n'est pas aider les gens à survivre
dans l'exclusion, c'est d'abord les aider à s'en sortir.
La vraie solidarité, c'est, pour les communes, les
associations, les services de l'emploi, d'aller au devant
des personnes en difficulté. La vraie solidarité, c'est
une solidarité qui s'exerce d'une personne vers une
autre personne, une solidarité fraternelle qui, en
retour, attend de celui qui reçoit l'engagement de se
mettre en mouvement.
C'est pourquoi nous devons nous mobiliser pour donner
tout son sens au volet insertion du RMI. Sa vocation
première, rappelons-nous, c'est de permettre aux plus
démunis de lever leurs handicaps. C'est en cherchant,
dans un dialogue approfondi, à comprendre les causes,
souvent multiples, qui ont conduit un homme, une femme,
une famille, dans la misère que ceux-ci pourront
retrouver la dignité et la confiance en eux, et
s'investir dans des formations leur permettant d'accéder
à l'emploi.
Nous devons aussi nous interroger sur l'efficacité de
nos autres politiques publiques. Plus de deux ans après
la mise en oeuvre de la loi contre les exclusions, il
faut en dresser le bilan et, si nécessaire, la faire
évoluer ou la renforcer pour lui permettre de remplir
pleinement sa vocation et de répondre ainsi à l'attente
profonde des Français.
Nous devons également apporter des réponses nouvelles
aux situations de pauvreté que vivent un nombre
grandissant de jeunes souvent sans qualification. Nous
avons le devoir de passer avec eux un véritable contrat
qui associe aide et engagement dans des actions de
formation.
Nous avons enfin le devoir d'encourager ces hommes et ces
femmes, chargés de famille qui, ne voulant plus d'un
système d'assistance, entament des démarches de retour
à l'emploi et acceptent souvent, dans un premier temps,
des emplois à temps partiel et faiblement rémunérés.
Leurs efforts doivent trouver une récompense réelle
dans l'amélioration de leur pouvoir d'achat. C'est
pourquoi je souhaite que le Parlement, qui examine
actuellement le projet de création de la prime pour
l'emploi, prenne bien en compte la nécessité d'aider en
priorité ces familles.
Nous le savons bien : c'est en coordonnant nos politiques
que nous leur donnerons un maximum d'efficacité. Et
c'est ainsi que nous montrerons notre vraie
détermination à lutter contre la pauvreté et
l'exclusion, comme vous nous appelez à le faire, cher
Abbé PIERRE, en France, mais aussi dans l'Union
européenne.
Le cri d'alarme que vous lancez en faveur des exclus de
l'Hexagone, vous le lancez aussi en faveur des millions
d'exclus de la planète pour lesquels vous demandez que
soit reconnu, dans la Déclaration universelle des droits
de l'Homme, le droit au logement. Depuis longtemps aussi,
vous demandez que la dette du tiers-monde soit diminuée.
Vous savez que je partage votre sentiment et que j'agis
vigoureusement et, je l'espère, efficacement en ce sens.
J'approuve aussi le combat que vous menez pour la
défense des droits de l'Homme et pour la liberté.
Chaque fois qu'il est question d'intolérance, de
non-respect de la personne humaine, votre voix se fait
entendre, cette voix qui nous dit : "Mes amis,
réveillez-vous ! Assez d'indifférence !"
Sans doute grâce à vous, le monde associatif n'a jamais
été aussi développé et aussi agissant qu'aujourd'hui.
Emmaüs-France, qui a obtenu la reconnaissance d'utilité
publique, compte pour sa part plus de 110 communautés ;
elles sont plus de 450 dans 50 pays du monde. Votre
objectif n'a pas varié : "Nous avons la
responsabilité, dites-vous, de montrer à l'humanité un
autre bonheur, une autre convoitise, un autre
rêve..."
Ainsi, au monastère de Saint-Wandrille où vous vous
êtes retiré, entre deux voyages, -vous arrivez de
Tananarive-, vous, le héros de la Résistance, le
pèlerin d'Emmaüs, le frère des pauvres, vous dont le
combat contre l'exclusion a fait une figure emblématique
de la défense des droits de l'Homme, vous êtes plus que
jamais, pour les Français et pour le monde entier, celui
qui refuse l'inacceptable, celui qui refuse la misère,
celui qui refuse l'injustice. Et c'est pourquoi nous vous
rendons aujourd'hui, à vous qui nous donnez une si belle
leçon de vie, cet hommage qui témoigne le respect et
l'affection, très profonds et très sincères, que tous
les Français ont pour vous et que j'exprime aujourd'hui
en leur nom.
Henry GROUÈS, Au nom de la République française, Nous
vous élevons à la dignité de Grand Officier de l'Ordre
de la Légion d'honneur.
Source Elysée
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